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|d L'invention des nouvelles technologies (cinéma, photographie, numérique) a entraîné une mutation concernant la conception d'une oeuvre d'art. L'influence n'a pas seulement touché sa poïesis, ses dispositifs de création, mais aussi son esthésis au niveau de la réception. Le texte littéraire, à l'instar d'une oeuvre d'art, se trouve ouvert sur de nouvelles formes, de nouveaux discours. L'acte de lecture procède par une « refiguration » qui met l'accent sur les techniques à partir desquelles une oeuvre se rend communicable, techniques repérables dans l'oeuvre elle-même1. Hans Robert Jauss2 infléchit le concept de la lecture vers celui de la réception comme un critère de la valeur de l'oeuvre créant un écart esthétique entre l'attente et l'expérience. Quelles nouvelles relations sont forgées alors entre la production esthétique d'une oeuvre d'art et sa perception collective? Umberto Eco considère tout texte comme incomplet à actualiser : en s'ouvrant sur l'oeuvre, l'auteur cherche à saisir une réalité plus complexe et plus fuyante ou même s'ingénie à représenter la fuite du sens et l'impossibilité de la saisie. Il existe dans ce rapport une dimension fondamentalement critique, feindre de se rallier à la forme close pour mieux la faire éclater de l'intérieur. Inscrite dans le flux et l'inachèvement cultivant même une doxographie qu'elle s'applique afin de reconnaître le texte et sonder les perplexités et les abîmes du sens, l'oeuvre ouverte se prive des assurances ou des consolations que procurent les figures de la discontinuité et de l'inachève-ment (Paul Valéry). Toutefois, le fait de refuser au texte sa clôture entraîne le risque de non-sens. Il appert que les actes d'écriture et de lecture du texte sont fondés sur deux piliers : collaboration et ouverture. La collaboration rallie d'autres instances liées corrélativement à certaines structures qui participent à la construction du texte. Quant à l'ouverture, elle regorge de complexité et de prolixité : n'est-elle pas génératrice d'une crise épistémologique dans la mesure où l'immanence du texte littéraire, comme de toute autre forme d'oeuvre d'art, est devenue incapable d'assurer sa survie et son aura? En contrepartie cette querelle épistémologique autour du statut de l'oeuvre d'art à l'ère de la reproduction technique n'ouvre pas des brèches pour ces nouvelles formes de médiation dans le champ de la critique littéraire? Ne réduit-t-elle pas, d'une façon ou d'une autre, l'art à un simple objet utilitaire?
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